Des pierres que voici, Dieu peut faire surgir des enfants à Abraham
C’est un avertissement à ceux qui se figuraient que d’être membre du Peuple élu était une position acquise, un privilège sur lequel ils pouvaient se reposer mollement. Non décidément ce n’est pas une sinécure d’appartenir au groupe de ceux que Dieu a choisis pour se manifester au monde ! Le même avertissement vaut certainement pour les chrétiens qui ont un peu trop tendance à croire que Dieu a besoin d’eux et qu’il tolèrera toujours leurs insuffisances et leurs incartades, rattrapant toujours les choses pour que l’Eglise poursuive sa route.
Eh bien non, décidément, si le Seigneur a promis à Pierre une assistance indéfectible, cela ne couvre nullement les bévues, les lâchetés, les négligences, les turpitudes des uns et des autres, qui sont graves et qui ont des conséquences. Dieu n’a pas donné à telle communauté d’Eglise précise les promesses de durer toujours. On a vu, dans le passé, des chrétientés longtemps brillantes disparaître presque complément parce qu’elles s’étaient endormies : en Asie mineure, en Afrique du Nord par exemple. Saint Jean, dans les lettres qu’il envoie aux Églises qu’il a fondées, n’a pas peur de les menacer de disparaître : « rappelle-toi d’où tu es tombé, repens-toi, reprends ta conduite première, sinon, je vais venir à toi pour changer ton candélabre de son rang, si tu ne te repens » annonce-t-il à l’Église d’Éphèse. Et il donne la raison : « j’ai contre toi que tu as perdu ton amour d’antan » (Apocalypse 2,4-5). A l’Église de Sardes, il déclare : « je connais ta conduite; tu passes pour vivant, mais tu es mort » (3,1). Quelques-unes de ces communautés ont sans doute effectivement disparu, au moins pendant un certain temps, car il n’en est plus question trente ans plus tard.
Quand on regarde l’Europe, foyer d’où ont rayonné longtemps la foi et la sainteté sur le monde entier, on se dit qu’un tel jugement de Dieu est sans doute en train de s’accomplir sur nous, si nous ne nous redressons pas. Mais à cette triste constatation il y a une contrepartie : la venue de ceux que Dieu fera surgir des pierres de la route. Ne doutons pas que l’appel de Dieu est toujours aussi fort et que, si notre société est lasse du christianisme qui l’a portée, ne le reconnait plus, n’en vit plus, ce sont d’autres qui arriveront et rempliront les places que nous laissons vides. Comme nous le disent les papes depuis quelque temps, la mission n’en est encore qu’à ses débuts. Il y a des foules que nous ne voyons pas, mais qui piétinent à la porte et qui attendent que nous ayons l’audace de leur proposer le salut qu’apporte le Christ.
Tous ceux qui ont accueilli d’anciens musulmans qui s’approchaient de l’Église vous diront que, pour beaucoup d’entre eux, c’est le Christ qui a fait le premier pas ; dans bien des cas, c’est à la suite d’un songe où ils ont vu Jésus (ou la sainte Vierge) qu’ils se sont mis en route. Comme si, devant le manque d’audace des chrétiens, Dieu faisait ce qu’il fallait pour que les hommes et les femmes de l’Islam le rencontrent ! Je suis persuadé pour ma part que l’avenir de l’Église est là : dans ces foules musulmanes qui ont encore un grand sens religieux, mais trouvent de moins en moins dans le système islamiste qu’on leur propose la nourriture de leur cœur et de leur intelligence. Quand ils auront compris que le Christ n’a rien à voir avec ce qu’en a fait l’Occident sécularisé, mais qu’il leur tend les bras et leur ouvre des trésors d’amour et de lumière, ils viendront en masse. Mais il faudra avant quelques martyrs pour ouvrir la brèche…