La foi a ses raisons
Saint Pierre, dans la lecture d’aujourd’hui, nous invite à ne pas mettre notre drapeau dans notre poche et à ne pas esquiver les questions qui pourraient nous être posées au sujet notre foi : « soyez prêts à tout moment à présenter une défense devant quiconque vous demande de rendre raison de l’espérance qui est en vous ». Ce n’est pas une proclamation publique, comme celle que lance Philippe dans la première lecture de ce dimanche, mais c’est une entrée en douceur dans l’évangélisation, profitant des questions que nous posent les non-chrétiens au sujet de notre croyance au Christ. Tant mieux quand il y en a ! Mais il ne faut pas avoir peur de les susciter.
Avons-nous à « rendre raison ? ». Est-ce que la foi n’est pas d’abord quelque chose de très personnel, où il n’y a pas de réponse-type, pas de démonstration pour y conduire ? N’est-ce pas perdre son temps que de discuter ? Beaucoup le pensent aujourd’hui. Mais faut-il les suivre? Notre religion est celle du Christ que saint Jean appelle le Verbe, le Logos en grec, qui se traduit aussi par « raison ». D’ailleurs, c’est exactement le mot qu’emploie Pierre quand il parle de « rendre raison ». Revenons à Jean : « Au commencement était le Verbe et le Verbe était auprès de Dieu et le Verbe était Dieu ». Le Fils est à la fois semblable et autre par rapport au Père, il est l’écho de ce qu’est le Père, mais il l’est sur un mode différent. Il nous montre le Père, il nous le rend accessible dans sa différence même.
La Révélation n’est pas un cri ni une énigme, elle a un sens, un sens qui nous dépasse, d’accord, mais pas si totalement que nous n’en devinions peu à peu la logique profonde. Elle nous provoque à écouter, à nous rappeler, à demander la lumière, à réfléchir et finalement à accueillir l’Inouï rendu présent en Jésus. Nous n’avons pas à choisir entre la foi et la raison, comme si la première était un suicide de notre intelligence. Nous avons à pousser jusqu’au bout notre désir de la vérité, jusqu’à ce que Dieu le comble par la rencontre de Celui qui est la Vérité même.
La science elle-même a besoin d’une foi qui vient au secours de la raison, car si le savant ne faisait pas confiance au réel, confiance que ce réel a un sens intelligible et qui se laisse approcher par le raisonnement et le calcul, il aurait jeté l’éponge depuis longtemps. L’a priori qui nous pousse à dire que le monde a un sens est le premier pas de la foi. Et peut-être pas le plus facile.
C’est pourquoi il n’est pas vain d’accepter la discussion autour de notre foi. En parlant à un quidam que nous avons rencontré, nous avons cette ferme conviction que l’autre, l’athée, l’agnostique, le bouddhiste avec qui nous parlons a lui aussi une raison qui est faite pour Dieu et donc que ce que nous avons découvert il peut le comprendre et l’accepter, et nous lui offrons sans problème la réciproque. Si nous ne cherchons que la vérité et comme la vérité est une, nous ne pouvons que nous rencontrer. Il ne s’agit pas d’habilité ou de force de conviction, qui seraient des mensonges sur ce chemin de lumière.
Ne désespérons pas de la Raison !