Toutes les générations me diront bienheureuse !
Elle n’a pas froid aux yeux, la Sainte Vierge ! Elle annonce qu’on parlera d’elle dans les siècles à venir ! Elle trace d’avance le programme que suivra l’Eglise en instituant un jour la fête de l’Assomption qui nous rassemble !
Orgueil ? Non pas ! Ce qui compte à ses yeux, c’est que Dieu soit glorifié. Or Marie est son œuvre, il s’est penché sur un petit être qui n’avait pas grand mérite (c’est elle qui le dit) pour faire éclater en elle toute sa générosité : en lui donnant à elle, la pauvrette, un rôle magnifique à jouer, il manifestait la gratuité de son amour. C’est là tout le sens du Magnificat, qu’on affaiblit un peu quand ont traduit « il s’est penché sur son humble servante », alors que texte dit : « sur la petitesse de sa servante ». Vous me direz : « mais alors l’Immaculée Conception ? Toutes les faveurs dont a joui la Mère de Dieu ?… ». En a-t-elle eu seulement conscience et, si elle a perçu ces privilèges, n’a-t-elle pas pensé que ce sont justement des faveurs et qu’elle ne méritait rien de tout cela ?
Il est quand même étonnant que Marie ait eu si tôt l’intuition que son aventure personnelle serait connue un jour de tous. Jésus n’est pas encore né, tout au plus deux ou trois personnes sont au courant de la grâce qui lui a été faite, et elle sait déjà, elle, que cela éclatera un jour en pleine lumière : Jésus sera connu et aimé de beaucoup et même quelque chose de l’amour qui nous porte vers lui se tournera alors vers elle. Si elle est aveugle sur sa propre perfection, elle est très éclairée sur les voies de Dieu.
Il y a bien sûr un précédent dans la scène de la Visitation, quand Elisabeth prononce cette phrase merveilleuse : « comment m’est-il donné que la Mère de mon Seigneur vienne jusqu’à moi ? » Qu’elle ait reconnu son Seigneur dans le petit être qui commence d’exister en Marie, c’est déjà énorme. Mais qu’elle ait cette délicatesse supplémentaire de se dire honorée de la visite de « la Mère de (son) Seigneur », c’est encore plus étonnant. Elle comprend que, même si c’est Dieu qui fait tout, il n’est pas vain de reconnaître et d’honorer les instruments dont se sert pour accomplir sa volonté, surtout quand ces instruments sont libres et consentants.
C’est tout le fondement de la dévotion mariale qui est là.