Les événements de la vie intérieure
En ce quatrième dimanche de l’Avent, traditionnellement l’Eglise nous fait entendre un récit tiré des premiers chapitres des évangiles de saint Matthieu ou de saint Luc qui nous rapportent ce qui s’est passé immédiatement avant la naissance de l’Enfant-Dieu. Cette année, ce qui nous est lu, c’est la Visitation, la rencontre de Marie et d’Elisabeth : la mère du futur Jean-Baptiste qui sent l’enfant s’agiter en elle à mesure que s’approche Marie porteuse de Jésus encore caché dans le sein de sa mère, les deux femmes se félicitent mutuellement et Marie fait monter vers le ciel son merveilleux cantique, le Magnificat.
En fait d’événement, c’en est à peine un : le tressaillement d’Elisabeth n’apporte aucun élément nouveau dans le récit, on pourrait sauter cet épisode sans que cela change quoi que ce soit au suivi du récit. Mais, en nous rendant sensibles à ce qui s’est passe à l’intérieur d’Elisabeth et de Marie, cet épisode nous signale l’importance de notre vie intérieure. Celle-ci ne s’inscrit pas sur nos agendas, elle n’occupe pas de place dans la série des tâches à accomplir, elle ne fait pas de bruit, mais elle qualifie notre vie en nous faisant toucher l’essentiel. Que serait la venue du Christ dans notre chair au moment de la communion, si elle n’était précédée, entourée, suivie par une expérience au plus profond de nous-mêmes ?
L’Eglise nous alerte sur ce point à quelques jours de la fête. Laissons-nous toucher par cet appel. Par une bizarre coïncidence, c’est au moment où le Mystère est le plus riche, le plus chargé de réminiscences, au moment où nous sommes conviés dans l’intérieur même de la grotte à partager sans paroles la joie de la Vierge et de saint Joseph, c’est à ce moment-là que tout le monde va s’agiter au maximum, multiplier les courses et les préparatifs, ainsi que les occasions de dispersion. Ne nous étonnons pas, après cela, que la fête soit parfois amère et tendue et que s’y produisent des réactions d’amour propre blessé. Au lieu du bonheur attendu, ce qui risque de régner, c’est une sourde déception, parce qu’on a laissé passer la visite du plus beau des enfants des hommes.
Ne passons pas à côté de la joie qui nous est offerte là, tout simplement. Comme tout vrai bonheur, celui-ci s’achète par le silence et commence dans notre cœur.