Les commandements de la loi nouvelle
On a souvent comparé le Christ du Sermon sur la Montagne à Moïse édictant la loi de Dieu sur le Mont Sinaï. La différence saute pourtant aux yeux : au lieu de la montagne secouée par les éclairs et la voix terrible de Dieu que les Hébreux ne voulaient plus entendre, c’est la douceur du Maître galiléen, qui enseigne au milieu de ses disciples et qui donne la charte du bonheur : « Bienheureux, bienheureux… ».
Mais n’exagérons pas l’opposition. Jésus n’est pas venu abolir, mais accomplir. Et la Loi trouve dans sa bouche une nouvelle jeunesse. L’accomplir, ce n’est pas la renier, c’est la porter à son terme. Or que voulait-elle, cette Loi, sinon ordonner l’homme à Dieu et faire entrer toute sa vie dans la foi au Dieu unique ? Jésus ne cherche pas autre chose et en radicalisant les préceptes du décalogue, il manifeste encore mieux que la sainteté est la vocation de tout homme, que l’héroïsme n’est pas réservé à certains, que le précepte lui-même peut exiger le don de sa vie.
Le but que s’était fixé le saint pape Jean-Paul II en publiant son Encyclique Veritatis splendor était de montrer que la morale chrétienne pouvait déboucher sur le martyre, qu’elle ne se contentait pas de fournir des idéaux, des perspectives en vue d’un progrès, mais qu’elle pouvait exiger, sous peine de péché, des renoncements pour maintenant. La question s’était cristallisée autour de ce qu’on appelle : « l’intrinsèquement pervers » : y a-t-il, oui ou non, des conduites que l’on ne peut en aucun suivre, même pour une fin par ailleurs légitime ? Y a-t-il des cas où pour sauver sa vie, on pourrait sacrifier celle d’un innocent ? Y a-t-il des cas où, pour préserver l’harmonie d’un couple, on devrait tolérer des entorses à la chasteté conjugale ?
Jésus est très clair sur le sujet : quand il réprouve la violence verbale contre autrui, il indique un châtiment (et quel châtiment, l’enfer !) si on vient à y céder ; quand il refuse le divorce, il indique aussitôt la conséquence : être adultère, si on cohabite avec quelqu’un qui n’est pas son vrai conjoint.
Mais la miséricorde, dira-t-on, où est-elle avec tout cela ? Eh bien, elle est là précisément, dans la vérité qu’on ose dire, au lieu de laisser les hommes dans la confusion et le compromis. La vérité vous rendra libres, a dit Jésus. Les hommes l’attendent, même si elle n’est pas toujours agréable à entendre. Combien, après un parole forte, ont redressé la tête, repris courage pour lutter contre le mal rampant qu’ils pressentaient. Et puis nommer le péché n’est pas écraser le pécheur. Pour la femme adultère, Jésus n’a pas cherché à excuser sa faute, mais il lui a dit « va et ne pèche plus ! ».
Nous avons plus que jamais besoin de cette vérité salutaire, qu’il faut toujours associer avec une tendresse toute maternelle pour l’enfant égaré. La fonction du père est de « dire la loi », on sent bien son absence dans notre société et jusque dans nos communautés chrétiennes. Mais courage ! Le Seigneur est là qui nous exhorte à rester le sel de la terre et la lumière du monde !