Tu m’as appelé, me voici !
La première lecture de ce dimanche nous fait entendre la merveilleuse histoire du jeune Samuel entendant l’appel de Dieu dans le Temple. La phrase qui précède immédiatement le passage que nous entendons nous dit ceci : « Le jeune Samuel servait le Seigneur en présence d’Eli ; en ce temps-là, il était rare que le Seigneur parlât, les visions n’étaient pas fréquentes », sous-entendu : elles le seront plus par la suite. Le rédacteur est presque obligé de s’excuser de faire tant de cas d’une apparition relativement mineure, car, pour ses lecteurs, ce genre de choses semble tout à fait normal et presque habituel. Heureux temps où les interventions de Dieu étaient monnaie courante ! Semblablement, quand Zacharie, père de Jean-Baptiste, à la suite de l’annonce reçue de l’ange Gabriel, s’attardait dans le sanctuaire et que la foule massée à l’extérieur ne le voyait pas sortir, « ils comprirent qu’il avait eu quelque vision » (Luc 1,22). L’explication était juste, mais apparemment elle ne surprenait personne. Je me souviens qu’il y a quelques dizaines d’années, on montrait encore à Hébron le tracé d’une rue qui faisait un détour à l’emplacement où un travailleur de l’endroit avait eu une apparition : c’était devenu un lieu sacré.
Dieu est-il moins présent aujourd’hui dans la vie des hommes ? Pas forcément. Vraies ou supposées, les apparitions de la Sainte Vierge se sont succédé au siècle dernier, ainsi que les miracles eucharistiques, les signes prodigieux qui ont entouré le Padre Pio se comptent par centaines de milliers, et le vingt et unième siècle ne semble pas en reste. Il y a sans doute plus d’interventions du surnaturel que nous n’en connaissons. Nous ne devons pas forcément courir après elles ou les solliciter à toute force, mais c’est un fait que là où il y a de la ferveur, là où les hommes prient et s’offrent au Seigneur, la vie ordinaire est traversée de pressentiments du ciel, des signes même très simples se dessinent à travers les événements.
La vie d’union à Dieu est par définition une vie extraordinaire. Elle va au rebours de ce qui est la pente normale de l’intérêt et du profit : au lieu de vouloir accumuler des biens, aspirer à s’en dépouiller, au lieu de remplir sa vie de ces riens qui occupent le monde, faire une place large à l’invisible, lui ouvrir des plages de silence où, assis à ses pieds, nous guettons un geste, un ordre… L’inouï est à nos portes, quand nous faisons pénitence, si peu que ce soit, et quand, au lieu de préférer notre confort, nous nous exposons volontairement au froid et à la faim.
Le monde ne s’y trompe pas, que ces retranchements énervent et fascinent tout à la fois. L’acharnement avec lequel beaucoup nient jusqu’à la possibilité de la chasteté chez les clercs et les religieux est un hommage indirect à l’œuvre de la grâce : si c’était vrai, ce serait une preuve que les surnaturel existe !
Oui, Dieu n’a pas cessé d’agir. Peut-être même qu’il redouble de provocations en ce temps !
Alors : « Parle, Seigneur, ton serviteur écoute ! »
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