Tous ceux qui étaient devenus croyants vivaient ensemble
Tel est le message qui, en ce jour octave de Pâques, nous parvient du christianisme des tout premiers temps : tous ceux qui étaient devenus croyants vivaient ensemble ! On pourrait répondre : c’est parce que c’était le début, quand on commence, tout est beau! Mais ensuite ils ont dû découvrir les difficultés. Aujourd’hui on est devenu plus réaliste : chaque famille vit de son côté et on se retrouve pour la messe du dimanche.
Ce n’est pas tout à fait cela : le souhait d’une vie plus communautaire entre les croyants ne s’est jamais tout à fait éteint du cœur des baptisés. D’abord il s’est réalisé dans la vie consacrée, où le plus grand nombre vit une vie communautaire aussi totale que possible. Partager pendant toute sa vie une grande proximité avec ceux et celles qu’on a reçu comme frères ou sœurs est un des grands défis de la vie monastique et de ses succédanés, jusqu’à aujourd’hui. Mais on voit que ce même souhait surgit périodiquement dans l’Église à chaque revival spirituel. Le Renouveau charismatique en a donné de nombreux exemples et les échecs dus à l’inexpérience ne doivent pas faire oublier les magnifiques réussites : ces couples qui ont voulu se mettre ensemble pour servir Dieu et le prochain, vivant une vie simple et fraternelle et partageant la joie de l’Évangile.
Il n’est pas bon pour un chrétien d’être seul. Moins aujourd’hui que jamais. Quand on fait une expérience du Christ et qu’on veut vraiment vivre avec lui, il est souvent difficile de partager cette ambition avec ceux qui nous entourent, c’est déjà très heureux si, dans le couple, la foi est partagée, mais cela s’arrête très souvent là. C’est pourquoi il est si important de créer de réseaux de sociabilité chrétienne. C’est le mérite des parcours Alpha d’avoir misé sur cette dimension conviviale, créant des espaces où on peut parler de ce dont on ne parle pas ailleurs, dans une ambiance gaie et détendue. Il y a des moments où on aspire à ne pas être toujours celui qui n’est pas comme les autres, celui qui doit se défendre, il est réconfortant de voir à côté de soi des frères et des sœurs qui partagent nos joies, nos questions et nos attentes.
On pourrait croire qu’on va trouver cet espace dans la vie paroissiale. Et il y a quelques cas où cela peut exister, mais c’est alors souvent lié à l’action et à la personnalité d’un prêtre et, celui-ci une fois parti, tout est à recommencer. Nos paroisses sont des familles perpétuellement recomposées, surtout dans la mobilité urbaine. La paroisse garde sans doute son importance, qui est d’être un lieu visible dans le paysage et d’offrir un certain nombre de services indispensables. Mais ne rêvons pas trop qu’elle aille beaucoup plus loin.
Mais on peut aussi espérer rencontrer une famille spirituelle, ou au moins un lieu d’élection où trouver sa nourriture, mais aussi des gens pour la partager. Il y a beaucoup de belles choses qui se font dans l’Église, mais il y en a sans doute une qui nous convient plus particulièrement. C’est la sagesse de notre Sainte Mère d’avoir abrité sous son aile protectrice des communautés, des tiers ordres, des confréries, en nombre presque infini. Le christianisme moyen, susceptible de plaire à tout le monde, est insipide. En dehors de la foi catholique, rien n’est obligatoire dans l’Eglise. Il est normal qu’il y ait des lieux, des groupes, des communautés où on trouve mieux son bonheur que dans d’autres. N’ayons pas peur de nous y attacher, sans excommunier les autres et restons prêts, quand nous n’aurons rien d’autre, à aller là où on pourra recevoir la parole et les sacrements. C’est souvent dans ces communautés d’élection que nous pourrons faire une expérience d’une vraie fraternité, car partant de la même base, nous pourrons mieux marier nos charismes, et aussi nous exercer à une charité concrète, parce que nous aurons la durée devant nous.
En tout cas, n’étouffons pas dans nos cœurs l’appel à une vie plus proche avec nos frères chrétiens…