Il y a éternité et éternité !
Evidemment : l’éternité de Dieu n’est pas celle des anges (qui ont eu un commencement). Celle à laquelle sont promis les hommes est encore différente : elle commence un jour (le jour de notre baptême) et elle s’épanouira peu à peu jusqu’à saisir tout notre être à l’heure de la Résurrection générale.
Nous avons aujourd’hui un peu de mal avec l’idée d’éternité, que nous associons à une durée interminable, laquelle ne fait pas forcément très envie. Pourtant l’homme, par le plus intime de lui-même, n’a jamais pu se résigner à la mort définitive, il est arrivé alors assez vite à l’espoir d’un au-delà, mais d’un au-delà désespérant. Quand on voit les mastabas de l’Ancienne Egypte qui sont sensés préserver le corps des défunts pour l’éternité, on n’a pas tellement envie de cette éternité-là : malgré les gravures qui évoquent de façon assez pittoresque les travaux des champs, la perspective est plutôt figée : le défunt engoncé dans son suaire trône au milieu des membres de sa famille et de ses serviteurs, il est invité à manger la meilleure nourriture qui soit, mais il n’a pas l’air d’y toucher.
C’est qu’en fait, les Egyptiens, comme tous les hommes avant le Christ, ne pouvaient avoir d’autre image de l’éternité que la prolongation linéaire du présent. La nouveauté avec Jésus, c’est qu’il en vient, lui, de cette éternité. Il y a fait l’expérience du bonheur inimaginable qu’est la vie divine, dans l’inépuisable jaillissement de l’amour des Trois. Il peut nous en parler et nous la proposer : « la vie éternelle, c’est de te connaître, toi, Père et celui que tu as envoyé… ».
Pourtant, comme on le voit, cette description reste d’une extrême sobriété, car les mots risqueraient autant de la cacher que de la révéler. Jésus dit cette phrase toute simple : « je vous prendrai avec moi, afin que là où je suis vous soyez vous aussi avec moi » (Jean 14,3). Saint Paul de son côté nous déclare : « nous serons toujours avec le Seigneur » (1 Thessaloniciens 4,16).
« Etre toujours avec », n’est-ce pas ce qui fait bondir le cœur d’un jeune homme ou d’une jeune fille dès qu’ils se savent aimés ? Il y a dans cette relation qui s’ébauche une promesse de bonheur, une découverte infinie qui s’annonce. C’est pour cela qu’ils peuvent se faire des promesses insensées et vouloir que leur amour rime avec « toujours ». Quand c’est Dieu qui nous promet, avec bien plus de garantie, cet avenir où nous serons ensemble, ne pouvons-nous pas y découvrir une ouverture inimaginable sur un bonheur qui sera toujours comme l’aurore d’un jour qui n’aura pas de fin ?