Un enseignement nouveau donné avec autorité
La première prédication de Jésus à la synagogue de Capharnaüm provoque l’étonnement. C’est surtout dû au caractère direct de son propos, il ne s’appuie pas sur des autorités rabbiniques, comme les maîtres de son temps qui commentaient à n’en plus finir des opinions reçues. Il dit et cela suffit, son propos est si fort, tellement fondé sur le plan de Dieu qu’il connaît comme personne, qu’il emporte l’adhésion de la plupart. On peut dire qu’avec lui, la différence entre le « dire » et le « faire » est comme supprimée : il dit et cela existe ! D’où les miracles qui découlent de son enseignement : « sors de cet homme ! », « ta foi t’a sauvé ! ». Les évangélistes se plaisent à noter la simultanéité entre la parole et la guérison : « aussitôt ! » (Matthieu 20,34 ; Marc 10,52 etc…).
On comprend aussi sa sévérité pour les maîtres qui « disent et ne font pas », qui prescrivent des comportements qu’ils n’appliquent pas eux-mêmes. Jésus est tout entier impliqué dans sa parole. Le don qu’il nous fait, ce ne sont pas de mots, c’est lui qui se donne. Jusqu’au bout il a été fidèle à sa mission et il l’a signée de son sang. Il ne faut pas l’oublier quand on pense à l’eucharistie. « Ceci est mon corps ! », le don qu’il fait avec le pain quand il le partage avec ses disciples, n’est pas le signe de sa présence, elle est sa présence même.
Ceci peut nous aider à répondre à une difficulté qui se fait jour à présent dans le débat avec nos frères juifs. Pendant longtemps on a surtout souligné ce qui séparait Jésus de la synagogue ; au risque d’une caricature, on a vu le judaïsme comme étroitement légaliste, insensible à la miséricorde etc… La réalité est bien différente, même si le danger a pu exister, mais il se trouve partout (y compris chez les chrétiens). Malgré les rapports assez durs qu’a eus Jésus avec certains pharisiens, il est loin de les condamner en bloc et c’est même avec eux qu’il a le plus de proximité, car le pharisaïsme était au fond une religion du cœur , rappelons-nous ce que disait l’un d’entre eux à Jésus : « Maître, tu as bien parlé en disant que Dieu est un et qu’il n’y en a pas d’autre; et que l’aimer de tout son cœur, de toute son intelligence et de toute sa force, et aimer son prochain comme soi-même, c’est plus que tous les holocaustes et sacrifices » (Marc 12,33).
Mais on a si bien réussi à replacer Jésus de Nazareth dans son environnement juif, qu’on en vient à douter maintenant qu’il y ait une vraie différence entre lui et ceux qui enseignaient la Loi en Israël à son époque. Pourtant un passage comme celui que nous étudions aujourd’hui devrait nous montrer le positionnement original qui est le sien : il n’est pas un simple commentateur de la Loi, mais celui qui se place face à elle, pour la porter plus loin, et l’accomplir (Matthieu 5,17). C’est lui qui a pu déclarer : « vous avez appris qu’il a été dit aux anciens, moi, je vous dis … » (Matthieu 5, 32 et suiv.).