Sainte(s) famille(s), je vous aime !
On connait le mot terrible d’André Gide : « familles, je vous hais ! » Et il en donnait la raison : « Foyers clos, portes refermées, possessions jalouses du bonheur ». On va laisser Gide à ses fantasmes, mais on va prendre la leçon au passage : la famille selon le cœur de Dieu n’est pas le lieu où l’on cultive égoïstement un bonheur « clos », c’est une aventure, encore bien plus audacieuse que la traversée de l’Atlantique à la voile. Découvrir l’autre dans une vie à deux, harmoniser ses goûts, ses volontés, ses sensibilités, c’est bien plus captivant que d’explorer l’Antarctique. Mais quand vient ce petit être imprévu et déconcertant qui réclame tant de soins, puis quand il s’en ajoute d’autres, et qu’on les voit grandir, l’aventure est à son maximum.
En nous proposant la famille de Jésus, Marie et Joseph, l’Église nous donne un singulier modèle. En tout cas, c’est une famille qui ne sent pas le renfermé : dans l’Évangile de ce dimanche, on bouge beaucoup. Et le fil conducteur de tous ces déplacements, ce n’était pas l’ascension professionnelle, la recherche du confort, la manie du changement, c’était l’obéissance à Dieu qui avait confié à ce couple étonnant le plus beau trésor qui soit : son Fils éternel né dans la chair. Pas beaucoup de stabilité, juste ce qu’il faut pour reprendre sa respiration et franchir l’étape suivante. Mais pour que cela ait marché, quel trésor dans le don de soi, dans l’attention à l’autre, dans l’humble disponibilité, mais aussi quel sens des responsabilités, quelle force d’âme, quelle persévérance !
Chaque famille est différente et les modèles humains en ce domaine sont variés. A quoi bon se comparer ? Les uns vivront tout en commun de façon proche, d’autres mettront plus d’indépendance, certains avanceront lentement et trouveront leur équilibre sur le tard, d’autres auront tout compris dès le matin du premier jour et vivront dans l’éblouissement de ce commencement.
C’est pourquoi l’exemple de la sainte Famille nous est proposé : parce qu’il est inimitable, parce qu’il rejoint suffisamment le cœur de toute vie familiale, sans nous laisser croire qu’il y a une recette.
Jésus nous donnera plus tard la clef : « il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime » !