Soyez mes imitateurs
Ce n’est pas la première fois que l’Apôtre se donne comme le modèle que doivent suivre ceux qui débutent dans la foi chrétienne. Bien sûr nous savons que Paul était largement conscient de ses faiblesses, il les détaille même dans certaines de ses lettres, il raconte sa fuite peu glorieuse de Damas (par la fenêtre !), il est fréquemment découragé, il s’emporte vite contre certaines résistances. Mais il sait aussi que ses nouveaux croyants ont besoin d’une référence vivante pour avancer dans leur vie chrétienne, pour insérer la prière dans leur emploi du temps, pour rebondir devant certaines difficultés, etc.… Paul est l’exemple vivant de celui que l’amour du Christ a saisi, puis façonné. Il peut dire : prenez-moi pour modèle…
C’est pareil pour nous. Nous avons tous grand besoin d’un guide qui ne soit pas seulement un enseignant, mais qui soit d’abord un témoin de la foi chrétienne, qu’il l’ait incarnée en quelque sorte dans son comportement, dans ses engagements, dans ses choix. La tradition chrétienne de la « paternité spirituelle » vient de là. Rares sont ceux qui ont pu aller loin dans la vie avec Jésus, sans avoir connu à un moment ou l’autre un tel « modèle », même s’ils savaient bien que nul n’est parfait.
La difficulté aujourd’hui vient de tous ces cas où des maîtres, ou ce que l’on croyait tels, se sont révélés de tristes sires, menant une vie double, trompant leur monde et se livrant par derrière à des comportements indéfendables. On comprend que ceux qui ont longtemps cru en l’un d’entre eux, lui ont fait confiance, lui ont ouvert leurs cœurs soient tombés de très haut. Face à cela, on a développé une salutaire distinction entre la fonction (qui est sainte surtout quand il s’agit d’un prêtre) et la personne qui en est investi. C’est la conviction de l’Eglise que les sacrements sont saints en eux mêmes, et non à cause de la valeur personnelle du ministre. On a rappelé que le bien qui avait été fait avait valeur en soi comme don de Dieu, même s’il était passé par des mains pécheresses. Heureusement !
Pourtant on ne peut pas aller trop loin dans ce sens, sous peine de transformer l’Eglise en une forme d’administration et les prêtres en distributeurs de sacrements. Il n’est pas vrai que la valeur spirituelle du témoin de l’Evangile soit pour rien dans la conversion de ceux qui s’approchent de la foi, ni dans la progression de ceux qui l’ont déjà. On ne peut pas dire que la sainteté ne soit pas communicative, que les sacrements eux-mêmes ne portent pas plus de fruit s’ils sont reçus dans un contexte de ferveur et de générosité que dans la banalité terne d’une église endormie. Bien sûr, il y a des exceptions et de très belles fleurs peuvent pousser sur du fumier. Ce sont des miracles qui arrivent tous les jours, et il faut en remercier Dieu. Mais ce n’est quand même pas cela que Jésus visait quand il formait ses apôtres et leur demandait d’être d’autres lui-même !
Demandons des prêtres, des apôtres, des missionnaires laïcs mais qui soient des saints !